Eglise Notre-Dame
EGLISE NOTRE-DAME d' Uuville-Nacqueville

Chapelle de Nacqueville
Un patrimoine religieux reconstruit
Une âme retrouvée
Une église pour rassembler

 

UNE EGLISE POUR DEUX COMMUNES
OU LA LONGUE MARCHE DE LA CONSTRUCTION DE L'EGLISE D'URVILLE-NAQUEVILLE

1944

Les églises de Nacqueville et d’Urville-Hague sont détruites au début juin lors des opérations militaires de la Libération. Les allemands avaient demandé au maire de Nacqueville d'abattre le clocher qui devenait un repère facile pour l'aviation anglaise, près des installations d'écoute sur les hauteurs de La Valette. Devant le refus du maire et après des bombardements très meurtriers consécutifs au Débarquement, l'église de Nacqueville est dynamitée. La nef de l'église d'Urville-Hague, très endommagée après les bombardements de la rue Saint-Jean, ne résistera pas à l'arrivée des chars américains à la fin du mois de juin.

1945

Les autorités civiles et religieuses, préfecture et évêché, s'accordent pour ne reconstruire qu'une seule église pour les deux communes. Le seul exemple dans le département. « Libre à vous de reconstruire deux églises, il n'y aura qu'un seul lieu de culte ». Mandement de Mgr Louvard lu au prône par l'abbé Levallois, curé de Querqueville et desservant de la paroisse avant l'arrivée de l'abbé Levesque(1)

1946

Le conseil municipal de Nacqueville accepte la proposition de l'évêque de construire l'église de « Nacqueville-Urville » sur le territoire de Nacqueville.

1949

Paul-Emile Paris, maire d'Urville-Hague, reçoit une lettre de François Champart, architecte parisien qui venait en vacances à Nacqueville, l'informant qu'une église unique pour les deux communes serait bientôt reconstruite sur Nacqueville. Le conseil municipal d'Urville-Hague s'indigne qu'une pareille décision ait pu être prise sans qu'il ait été consulté. « M. Champart n'a jamais été sollicité pour défendre les intérêts de la commune. La construction d'une église commune sur une commune voisine aliène les droits d'Urville-Hague. L'article 2 de la loi de 1946 concernant les dommages de guerre spécifie que les sinistrés auront droit à la réparation intégrale. Le conseil réaffirme donc sa volonté de voir son église reconstruite à son ancien emplacement et charge le maire de faire diligence auprès de M.Levavasseur, architecte désigné par la commune, pour qu'il fasse le nécessaire ».

1950

Nouveau débat au conseil municipal d'Urville-Hague, le 22 août 1950 : quatre voix pour l'église unique, deux contre et une abstention, un conseiller ayant quitté la séance. Le 26 août, les deux conseils municipaux se réunissent pour s'entendre sur l'emplacement de l'édifice. A la fin de l'année, les deux conseils décident de mettre en commun les créances des dommages de guerre des deux églises détruites et de construire un seul édifice confié aux architectes Levavasseur et Champart, étant entendu que la capacité de l'église devra correspondre aux besoins des deux populations sans oublier l'afflux des estivants. On prévoira une tribune. Le clocher d'Urville sera réparé. Une chapelle sera construite au centre du cimetière de Nacqueville. La commune de Nacqueville est d'accord pour prélever une part des dommages de guerre de son presbytère pour financer les réparations de celui d'Urville. Le surplus sera attribué à la reconstruction des écoles et de la mairie. L'entretien de la nouvelle église et du presbytère d'Urville incombera à parts égales aux deux communes.

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1952

Promesse de vente d'un terrain par Melle Tour à la limite des deux communes.

1953

Année d'élections municipales : l'enjeu à Nacqueville est la reconstruction de l'église, de l'école et de la mairie à Nacqueville haut. Sur demande de M.Hersent, châtelain, (son grand-père avait fait don d'une église neuve et de la mairie en 1901), le nouveau conseil se détermine le 3 septembre 1953 : six voix pour la reconstruction des bâtiments communaux en haut de Nacqueville, trois contre dont celle du maire, Jean Leroy et deux abstentions. M.Hersent intervient près de Champart (septembre 1953) qui le trouve « très accroché ». Suite à sa visite à l'évêché accompagné d'une délégation de conseillers, il confirme aussi dans une lettre à Mgr Guyot : « Une partie non négligeable de la population de Nacqueville va se trouver très éloignée de l'église et des écoles ». Reconstruire en bas reviendra à plus cher puisqu'il faudra acheter des terrains. « Je serai disposé à mettre l'orphelinat à la disposition du Diocèse pour ses œuvres ou à toute œuvre religieuse qui aurait votre agrément »[...]« Le montant du dommage prévu pour l'église est extrêmement faible : le coût de l'église de Nacqueville offerte en 1901 par mes grands-parents s'est élevé à 200000 francs or »[...]« Les habitants de Nacqueville seront privés de leur clocher entraînant l'abandon de leurs tombes ».

1954

La préfecture et l'évêché attirent l'attention des élus sur les inconvénients de la reconstruction des bâtiments communaux à Nacqueville haut. Nouveau vote à bulletin secret : six voix pour la reconstruction en haut de Nacqueville, quatre contre et une abstention.
Le 25 août, des estivants adresse une pétition au maire de Nacqueville dont une copie est adressée à Mgr Guyot (35 signatures). « Nous apprenons qu'il est question que l'évêché envisage la suppression de la cure en raison du défaut d'entente entre les deux communes, Nous croyons indispensable de vous exprimer l'angoisse où cette perspective plonge les familles chrétiennes d'estivants de Nacqueville, en faveur du projet d'une église commune ».
Le 27 août, M.Hersent propose à la commune l'orphelinat du haut de Nacqueville remis en état pour en faire une école en attendant les constructions neuves. Sept élus donnent leur accord, quatre sont contre.
Le 8 novembre, le préfet menace de retirer le projet d'une seule église pour les deux communes de ses priorités « si dans un délai de trois mois, les deux collectivités de Nacqueville et d'Urville ne se sont pas mises d'accord ». La majeure partie du conseil démissionne, ce qui entraîne de nouvelles élections. Mais les électeurs « font le ménage » et mettent à la mairie des partisans d'une église commune.
Le 24 décembre, le conseil de Nacqueville revient à la délibération de 1952 et demande que le chantier soit déclaré d'utilité publique afin de démarrer au plus vite en 1955.

1955

II est temps de faire les comptes.

Valeur des édifices en 1939 :
Nacqueville : ... 1 947 735 F
Urville : ............. 638 457 F
Soit, en appliquant le coefficient, de 21,50 MF de disponible.

L'abbé Raymond Poignavant, professeur à Saint Paul de Cherbourg, est nommé curé de la paroisse d'Urville-Nacqueville avec mission de ramener la paix dans les esprits et de mener à bien la construction de l'église. Installation en août. On pense à trouver un saint patron pour la nouvelle paroisse. Un moment on pense à Saint Clair. Un cachet est même confectionné : « Paroisse Saint Clair Urville-Nacqueville Manche ».
Lettre du chanoine Pinel au nouveau curé : « Désireux d'arranger la situation (?) et d'être agréable à son Excellence, Levavasseur accepte de faire les travaux du presbytère, la chapelle de Nacqueville et le mémorial du cimetière joint au clocher d'Urville ».
Lettre de Champart au maire d'Urville : « Vous m'avez choisi pour l'église, transmettez mon dossier à Levavasseur pour la réfection du presbytère ». Une façon de dédommager cet architecte local qui avait été un temps pressenti. Il mènera à bien la construction de la chapelle de Nacqueville également (2).
Lettre du chanoine Pinel à l'abbé Poignavant : « Rencontré Champart, l'architecte de votre future église. M'a dit les grandes lignes qu'il pense suivre du projet de l'église. Me semblent bonnes ». « Maires et curés feraient bien de le voir et de le pousser car il est lent mais il a du goût et comprend ce qu'est une église, ce qui est, hélas, assez rare ! » « Pour le presbytère, voyez Levavasseur, car lui aussi, est très lent. C'est une décision qui l'écarte du projet de l'église qui devait être réalisée en commun. Je crois qu'il en a gros sur le cœur ». « Vu le directeur de la Coopérative de Paris. Il ne demande qu'à lancer les travaux mais cela ne peut se faire que sur mémoires et plans d'architectes. C 'est là le point crucial ». « Je dois vous avouer que cette affaire d'Urville-Nacqueville m'a donné bien du souci. Aucune n'a été aussi compliquée ».

1956

Mai 1956 : le chanoine Pinel veut un autre presbytère et vendre celui d'Urville-Hague !
Lettre au curé : « M. Champart a du talent, on peut discuter avec lui. Vous voyez qu'une église demande du temps, une gestation... sinon c'est gâché. Courage ! »

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1957

Champart établi des devis pour 40 895 000 F auxquels il convient d'ajouter le mémorial(3) de Nacqueville, 8 MF et le mémorial d'Urville, 2 MF.


1958

Le 15 août, dans la chapelle provisoire, les paroissiens découvrent la maquette de leur future église. « Elle plaît aux gens » écrit l'abbé Poignavant à l'architecte. « Mais je trouve que l'autel est loin des gens : je suis inquiet de l'audition. Le contact du célébrant et des fidèles sera difficile à établir ». Pose de la première pierre par le chanoine Caillot, vicaire général. L'abbé Poignavant demande à l'architecte qui surveillera les travaux au jour le jour : « Mais vous, Monsieur l'abbé! »

1959

On refait les comptes : il faut une rallonge de 10 MF. M.Hersent fulmine dans un courrier adressé au maire : « 10 400 000 F, c'est 25 % de plus. C'est une faute lourde de la Coopérative. A elle de les prendre à sa charge ! » Les conseils municipaux traînent les pieds et ne comprennent pas. Le chantier attend plusieurs mois, laissant la charpente à l'air libre. On rachète des dommages de guerre, en fait un prêt du Crédit Foncier. La tutelle constate que le terrain n'est pas payé ! Les communes s'en prennent au notaire (plainte près de l'ordre des notaires) en constatant que le nantissement n'a pas été pris. Ce qui ne fait que retarder les travaux. Le projet de la chapelle de Nacqueville est revu à la baisse. On refait les comptes en enlevant ce qui n'est pas prioritaire : les vitraux, les bancs, le mobilier, etc.

1960

Le dimanche 30 octobre, à l'issue de la dernière messe dans la chapelle provisoire, le Saint Sacrement est conduit en procession dans la nouvelle église. La première messe y sera célébrée le surlendemain, le mardi 1er novembre, fête de la Toussaint.

1961

Après plusieurs mois d'usage, l'abbé Poignavant se plaint près de l'architecte qu'il est loin des fidèles. Impression renforcée par la table de communion. Réponse de Champard : « Vous avez eu le temps de voir les plans et la maquette » Sous-entendu : « Maintenant, il est trop tard ! Une table est une table. Le repas du Jeudi-Saint fut un repas. Et la nappe, avez-vous pensé à la nappe ? ». Le 5 août, consécration de l'autel. Le lendemain, bénédiction des cloches par Mgr Fauvel, évêque de Quimper, originaire de Valognes, Mgr Guyot étant souffrant.


©A.B. Avril 2010

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(1) L'abbé Levesque était le fils de l'architecte qui construisit l'église de Nacqueville et plus tard celle de Biville.
(2) On doit à cet architecte éminent la construction de la Gare maritime de Cherbourg dans les années 30 et à Landemer, la construction de la villa de la Roche Airel.
(3) Cela deviendra une habitude dans le département de construire un mémorial aux endroits où l'on ne reconstruira pas les églises. Exemple Graignes, Saint-André-de-Bohon.
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Sources :

Archives paroissiales
Archives communales Journal paroissial : « La Voix de La Hague »
Roger-Jean Lebarbenchon : « La Hague, le viking, le curé et la République »
Roger-Jean Lebarbenchon : « La Hague, de la Belle Epoque au nucléaire et à l'euro »
Michel Martin : Articles dans le bulletin municipal d'Urville-Nacqueville

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